Avez-vous noté que l’on a tendance à minutieusement observer les nouveaux embauchés ? On note leurs comportements, on analyse et interprète leurs propos. Cette démarche est rarement motivée par notre intention d’apprendre de leur expérience : on essaye plutôt de les projeter dans notre culture, dans nos habitudes et notre quotidien.
J’ai régulièrement connu de nouveaux collègues, managers, pairs ou collaborateurs, rejoindre mon entreprise. Beaucoup ont su s’intégrer naturellement. D’autres ont eu plus de mal. Parmi ceux qui ont eu des difficultés (certains n’ont jamais réussi), j’ai pu observer 5 erreurs récurrentes, qui sont raisonnablement faciles à éviter les semaines qui suivent son arrivée.
Se référer sans cesse à son ancienne entreprise
Vous avez rejoint une nouvelle entreprise. Vous avez normalement coupé le cordon avec la précédente. Vos nouveaux collègues seront ravis de vous expliquer comment les choses se passent « ici ». Mais ils se moquent de savoir comment ça se passait dans votre ancienne boutique. Et ils vont rapidement se lasser de vos références à votre passé – qui n’est pas le leur. Pire, s’ils sentent un regret ou une nostalgie dans vos propos, ils vont prendre plus de temps à vous considérer comme un des leurs.
Si ces références perdurent dans le temps (plusieurs semaines), ils risquent de vous percevoir comme quelqu’un qui n’est pas à sa place.
Imaginez que vous aillez une expérience passée parfaitement transposable: vous maîtrisez une pratique ou un outil qui est en mesure de beaucoup apporter à votre nouvelle entreprise. Soit vous le présentez sous l’angle « on était meilleurs dans mon ancienne boite, je vais vous montrer ce qu’on faisait », vous allez faire face à une résistance naturelle. Soit vous le présentez sous l’angle « vous m’avez fait part de vos difficultés et je peux vous aider », le positionnement est complètement différent.
Ne pas s’intéresser aux produits et aux spécificités des clients
Dans la quasi-totalité des entreprises, les salariés sont fiers de ce qu’ils font. Un salarié du nucléaire va être fier de la fiabilité et de la sûreté de ses systèmes. Un travailleur du transport va être fier de son apport dans la mobilité de ces concitoyens. Un cadre de l’industrie pharmaceutique sera fier de sa contribution à la santé. Les exemples sont infinis.
Lorsque l’on rejoint une entreprise, c’est pour occuper une fonction dans un contexte business donné. Ce qui fédère votre environnement, ce ne sont pas les fonctions des uns et des autres, mais leur finalité, les produits réalisés, les services fournis, et bien sûr les clients que l’on sert. Pour réussir son intégration, il est essentiel de comprendre sa mission et d’être en mesure de rapidement l’exercer de manière autonome et performante. Mais si cette facette de votre prise de fonction n’est pas associée à un intérêt marqué pour le contenu des produits et services de l’entreprise, et pour les problématiques de ses clients, alors il manquera le supplément d’âme de nature à vous faire accepter de vos collègues.
Accaparer le temps de parole lors de ses meetings de rencontre
On n’a qu’une seule occasion de créer une bonne première impression. Lorsque l’on rejoint une entreprise, on rencontre de nombreuses nouvelles personnes, souvent en tête-à-tête. Pour comprendre la dynamique de ces échanges, comme souvent en management, il faut savoir se mettre à la place de l’autre. Imaginez un instant que c’est vous qui recevez le nouvel embauché. Vous allez rapidement identifier toutes les informations intéressantes à lui communiquer et vous souhaitez vous projeter sur votre future collaboration avec lui. Mais, franchement, vous vous moquez un peu de son parcours. Inversons les rôles : vous rencontrez à présent vos nouveaux collègues. Bien sûr qu’il faut se présenter, mais de manière très succincte, et en privilégiant les messages sur ce qui vous rapproche et votre volonté de coopérer plutôt que sur votre passé. Lors de ces premiers échanges, la bonne attitude à adopter, c’est définitivement l’écoute active. Votre capacité d’écoute sera forcément évaluée par votre interlocuteur.
Proposer des solutions avant de comprendre les problèmes
Vous avez rejoint une nouvelle entreprise pour y apporter votre expertise, vos idées, votre énergie. Et celui ou celle qui vous a recruté vous a confié une mission qui vous permettra de valoriser votre savoir-faire. Mais il faut savoir faire preuve d’un minimum de patience. Gageons que les personnes en place dans l’organisation que vous avez rejoint ne sont ni complètement incompétentes ni stupides. Ne sous-estimez pas la complexité de la situation. Avant de proposer des plans d’actions ou de lancer des initiatives de transformation, prenez le temps de vous assurer d’une bonne compréhension du contexte, des difficultés, des capacités des équipes, de leur vision des choses et de leur appétence au changement. Appuyez-vous sur une analyse structurée pour mettre en avant vos propositions. Soyez vigilants à associer vos nouveaux collègues et adoptez une posture collaborative. Enfin, faites au mieux pour vous assurer d’appuis dans l’organisation en place pour promouvoir vos initiatives.
Juger le passé
On ne peut pas revenir sur le passé. On peut s’en servir pour apprendre, mais on ne peut pas le modifier. Quand on rejoint une entreprise, on doit être vigilant à ne pas le juger. Peut-être que les décisions qui ont pu être prises n’ont pas conduit aux résultats escomptés. Certainement qu’il y avait mieux à faire. Mais il est vraisemblable que les équipes que l’on rejoint se soient investies sans ménager leurs efforts. Elles ne sont pas prêtes à s’entendre dire par un nouvel arrivant que ce qu’elles ont fait est médiocre.
Quand on arrive dans une organisation dysfonctionnelle avec la mission de rétablir un cadre et un cap, la bonne attitude est d’en profiter pour « remettre les compteurs à zéro », rassurer ses collègues sur son état d’esprit et sa volonté d’aller de l’avant. Sa non-implication précédente est une chance pour démarrer une nouvelle saison sur de nouvelles bases. Avec les forces en présence bien sûr, mais sans jugement, et ainsi sans rancœur, on peut susciter l’adhésion de tous.
En conclusion:
Lorsque l’on rejoint une entreprise, c’est avec une mission, une situation à améliorer, des choses à créer, des problèmes à résoudre. Mais le temps des décisions et de l’action ne peut se faire qu’après une première phase d’écoute active. À cette occasion, on fera part de son intérêt sincère pour ses nouveaux collègues, leurs réalisations et les produits de l’entreprise. Une fois cette phase initiale passée, on disposera à la fois des éléments de contexte nécessaires, et de la confiance de ses nouveaux collègues pour passer à l’action.
Ce post fait suite à un article précédent, des conseils pour une prise de poste réussie.
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Photo: Khajurao, Inde.