Le podium du Vendée Globe 2024 est maintenant connu. La performance des trois premiers est remarquable. Ils se sont exprimés lors de la conférence de presse organisée à leur arrivée. Au-delà de l’exercice de communication qu’ils maîtrisent parfaitement, ils nous montrent là de vraies compétences en management.
Charlie Dalin, Yoann Richomme et Sébastien Simon sont tout sauf des vieux loups de mer. S’ils affichent de très différentes personnalités, ils partagent de nombreuses qualités managériales.
Revenons sur cette course historique, pour en tirer quelques leçons de management.
Culture de la performance
Écoutez attentivement la conférence de presse de Yoann Richomme. S’il ne cache ni son gout pour la compétition, ni son envie de gagner, il insiste surtout sur sa volonté de « rendre la meilleure copie possible ». Charlie Dalin l’exprime différemment, mais l’idée est la même : pour lui les résultats sont le fruit de la préparation. Il a su apprendre, ne négliger aucun détail, mettre toutes les chances de son côté.
Il existe une différence subtile et importante entre ceux qui veulent « gagner » (battre les autres) et ceux qui veulent « être le meilleur ». La victoire, c’est ce qui nous compare aux autres. Être le meilleur, c’est la reconnaissance de ce que nous avons fait. Cultiver la culture de la performance, c’est chercher à toujours progresser pour devenir (le) meilleur. Ils ont su ne pas se tromper d’objectif, et c’est indubitablement une clé de leur réussite.
Travail d’équipe
Nos trois héros ont largement félicité leurs équipes. Ils les ont toujours associés à leurs exploits. Ils insistent sur la difficulté que représente la création d’une telle équipe, et l’importance de la maintenir. Enfin, ils reconnaissent qu’ils doivent beaucoup à leurs équipiers. Si la course est « sans assistance », sa préparation d’une part, et la gestion des avaries d’autre part est tout l’inverse. Pouvoir compter sur des équipiers fiables, compétents et engagés a été un élément clé de leur réussite. Ils le savent, l’apprécient et le communiquent largement.
Pluridisciplinarité
La voile est un sport, nos héros sont des sportifs aguerris. Mais leurs aptitudes physiques et mentales ne représentent qu’une partie de leur boite à outil. Les trois sont ingénieurs et disposent de bagages techniques solides. Ils sont aussi de fin analystes météo et ont développé un sens de la prévision des phénomènes particulièrement pointus. Ils sont d’excellents organisateurs, planificateurs, pour prévoir pendant plusieurs années un périple de presque 3 mois. Cet élément les distingue. Ils ont un panel de compétences dans de très nombreux domaines, ce qui leur confie deux avantages stratégiques. D’une part, ils ont une vision holistique des problèmes et peuvent apporter des solutions globales, pour faire les bons choix. D’autre part, ils ont une capacité à s’adapter aux aléas de manière remarquable. Nul imprévu ne peut vraiment tomber hors de leur périmètre de compréhension.
L’adaptation plus que la prévision
Sébastien Simon a perdu son sponsor à quelques années du départ. Il ne s’est pas démuni et a su trouver les ressources pour reconstituer une équipe, trouver un nouveau sponsor (Groupe Dubreuil), acheter et préparer un bateau.
L’adaptation, c’est aussi l’art de gérer les incertitudes météorologiques qui sont nombreuses sur une course d’une telle durée. Si Charlie Dalin apparaît comme un extraordinaire planificateur, il n’en est pas moins capable de changer ses plans dès que les conditions le nécessitent.
Yoann Richaumme, derrière son côté décontracté, explique souvent comment il se fie à son intuition. Cette intuition n’est pas un don de la nature, c’est le fruit de milliers d’observations en situation.
Plusieurs styles pour atteindre des résultats
Nos trois skippers ont des personnalités très différentes.
On imagine Charlie Dalin plutôt introverti, et Yoann Richomme plutôt extraverti. On imagine Sébastien Simon plutôt orienté « relations » là où ses deux compères apparaissent orientés « résultats ». Classez ça dans n’importe quel outil de détermination de profil, aucun des trois ne sera dans la même case. Pire, ils seront dans des cases opposées. Et pourtant, objectivement, ils ont tous les trois démontré un niveau de performance remarquable. Car cette performance n’est pas liée à leur personnalité, mais à leur capacité à l’adapter aux situations. Tous les styles peuvent réussir, à partir du moment on l’on se connait et où l’on sait s’adapter. Parce qu’elle est là la vraie compétence : l’adaptation aux circonstances.
En conclusion :
Charlie, Yoann et Sébastien se connaissent assez bien, la voile est un petit milieu. Ils ne sont pas forcément des amis proches, mais ont un profond respect les uns pour les autres et savent apprécier leurs qualités et performances respectives. Cette émulation les tire vers le haut et en fait de beaux exemples pour tous les apprentis leaders.
Leur réussite ne doit rien au hasard, ils ont beaucoup travaillé. Ils ont su se préparer, s’entourer, s’adapter, prendre des risques. Ils ont réussi, et réussiront encore – en Imoca autour du monde ou ailleurs. Bravo à eux. Et Merci !
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Photo: Phare de la Canée, Crête, Grèce.